Un petit goût d’antan

En matière d’écriture, l’école a du pain sur la planche. Avec cette généralisation des photocopies, les écoliers modernes passent leur temps à coller des petits bouts de textes à trous dans les cahiers au lieu d’écrire. A mon sens, c’est doublement adhérant… triplement même !

  1. Pour savoir écrire, bien, vite et sans efforts il n’y a qu’une seule méthode, la pratique.
  2. Pour apprendre l’orthographe, écrire est plus efficace que lire : cela oblige à regarder chaque syllabe, chaque lettre.
  3. On colle du papier sur du papier… c’est un gaspillage hallucinant !

Tout commence en maternelle. Des photocopies de lignes de lettres à repasser au crayon, des lignages géants pour tracer des lettres proportionnellement hautes comme une phalange de l’enfant et les mauvaises habitudes qui s’installent. Avez-vous déjà essayé d’écrire 2x plus grand ? C’est le bras qui compense ce que les doigts ne peuvent matériellement plus faire.

Puis viens le CP. On révise à la va-vite, une ligne de lettre par-ci, un mot de temps en temps. Attendez… on révise ? Mais quand a-t-on appris ? Jamais ! Le ductus des lettres est mauvais, on ne le corrige pas, aller, aller, ce n’est pas bien grave, il faut avancer dans le sacro-saint programme. La position des doigts est mauvaise ? On ne le corrige pas non plus, pas le temps d’être derrière 30 loupiots…

Le CE1 commence, l’école se réveille enfin et met en place des cours de soutient pour les enfants qui ont des difficultés d’écriture. Mais les habitudes sont tellement encrées maintenant que l’effort demandé par le changement est devenu considérable.

On rembobine le film et on va essayer de comprendre quelles étapes on été ratées. Après tout, il n’y a pas que l’école dans la vie, à la maison aussi on peut apprendre ! Pour nous l’année du Covid aura été salutaire, j’ai pu constater au quotidien l’ampleur des dégâts et redresser le tir quand c’était encore facile, soit en milieu de CP. A toutes les mamans qui me lisent, et quel que soit l’âge de votre enfant, il n’y a pas de temps à perdre : plus vite on s’attaquera au problème et mieux ce sera.

Première étape : la tenue du crayon. Là pour le coup j’ai été vraiment directive, je lui ai demandé plusieurs jours de suite de tester en tripode, pour voir si ça améliorait la mobilité, sa prise quadripode initiale ayant une fâcheuse tendance à amener le pouce sur l’index par manque de place et donc à réduire à néant tout espoir de mouvements fins. La petite vidéo de la voiture de l’excellent ergothérapeute canadienne Josiane Caron Santha a bien aidé à dédramatiser grâce à l’humour. Grande amélioration de la mobilité, au détriment de la légerté : il a commencé à graver le papier. J’ai poursuivi malgré tout… le gain étant supérieur à la perte.

Deuxième étape : le ductus des lettres. Pas 36 solutions, il faut les revoir une à une. Mais des lignes de lettres seules ne sont pas suffisantes, en écriture cursive la lettre varie en fonction de ses voisines. J’ai deux coup de cœur pour cette étape. Les lettres mobiles Caïmo et les cahiers d’écriture de Laurence Pierson. Avec les lettres mobiles, qui existent en attaches hautes et en attaches basses, l’enfant prends conscience de la variabilité de la lettre.

Avec le cahier d’écriture, qui après une une que ligne de lettre, fait travailler la lettre dans la syllabe, dans le mot puis dans la phrase, il pratique intelligemment. Le lignage Seyes est à peine plus grand que la normale ce qui permet d’habituer les doigts au geste réel (2.5mm au lieu de 2mm).

Troisième étape : une fois les doigts habitués à prendre leur place, apprendre à alléger la pression. Là, j’ai simplement multiplié les outils pour donner le choix et tester ce qui fonctionne le mieux. Crayon de papier, bille, stylo plume et roller gel. Le bille est clairement le plus mauvais choix, alors que c’était celui de l’école pour le CP ! C’est celui qui oblige à appuyer fort pour écrire. Une fois passé avec un outil qui laisse couler l’encre facilement, il a commencé à relâcher un peu de pression. Le plume reste malgré tout assez difficile à manier, il faut le tenir dans le bon angle, l’encre sèche lentement et bave parfois, utiliser une règle est complexe et les effaceurs donnent un résultat pas si propres que ça. Il rajoute un défi supplémentaire et nécessite de la concentration alors qu’il faut pouvoir à se stade acquérir des automatismes. Je pense donc le proposer uniquement pour des exercices de copie/calligraphie (une carte de vœux, un poème…). Pour ma couture, j’avais acheté un stylo Frixion, effaçable à la chaleur.

Gros coup de cœur de mon loulou qui aime la belle encre bleue très foncée et se sent en confiance d’avoir le droit à l’erreur (plusieurs fois si besoin !). Pas besoin de changer le corps du stylo à chaque fois, il existe des recharges. La “gomme” ne s’use pas, car elle fonctionne par production de chaleur, elle n’absorbe pas l’encre. Pour le moment il avait un crayon pointe moyenne, mais avec le grand choix dans les rayons au moment de la rentrée j’ai trouvé des pointes fines. Ce sera mieux !

L’école les a d’ailleurs conseillés pour le CE1 – comme quoi parfois on est d’accord ;)

(Oups, il a oublié le s à lunettes et le point en fin de phrase… je lui ferais rajouter ce soir !)

Quatrième étape : la pratique. Il faut écrire, chaque jour. Je lui fais apprendre les mots par cœur de l’école par la copie, puis par la dictée. Nous avons également entamé le cahier de majuscules, toujours de Laurence Pierson, qui en plus d’apprendre à tracer les majuscules, propose la copie d’un petit texte. Le travail de copie est un formidable moyen d’apprendre, Charlotte Mason le préfère à la dictée pour les plus jeunes et je suis bien d’accord. Quand le geste d’écriture demande encore une partie de l’attention, le cerveau n’a pas encore assez de ressource pour se concentrer pleinement à l’application des règles d’orthographe et de grammaire. Une difficulté à la fois, depuis le Nido Montessori on vous le répète !

Ces jours-ci j’ai remarqué une accélération dans la vitesse de copie. Il a tenté pour le plaisir d’écrire un mot les yeux fermés et franchement le résultat est pas mal du tout. Les lettres sont un peu grosses et légèrement irrégulières mais on voit qu’il commence à avoir le geste dans les doigts. Et comme par hasard, il est désormais devenu capable d’écrire quelques mots et quelques phrases courtes sous la dictée

L’écriture est en train de devenir un outil !

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